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La fraude financière et les états financiers – 2e partie : TRANSACTIONS ENTRE APPARENTÉS

La fraude financière et les états financiers – 2e partie : TRANSACTIONS ENTRE APPARENTÉS

Résumé
5 minutes de lecture

Voici un article portant sur la fraude financière des états financiers, 2e partie, publié dans Le Monde juridique, écrit par Corey Bloom, associée et leader en juricomptabilité et Un Chi Kuan, consultante principale.

La première partie de cette série, qui est parue dans le dernier numéro (volume 26 – numéro 4), portait sur les fraudes dans les états financiers (FDLEF). Il y était question de certains enjeux généraux concernant ce type de fraude qui, en moyenne, est celui qui cause les dommages financiers les plus importants par occurrence. Maintenant que vous êtes un peu plus au fait de leur importance, quels sont certains des enjeux propres aux FDLEF à garder en tête? Commençons par discuter de la divulgation des transactions entre apparentés. En cette ère financière où l’on collectionne les sociétés de gestion et où, souvent, chaque projet a sa propre société, la liste des apparentés peut vite s’allonger. Qu’en est-il des transactions avec les dirigeants? Des transactions avec des sociétés détenues par des investisseurs communs?

Les apparentés, pourquoi est-ce important?

Les transactions entre apparentés prennent de plus en plus d’importance aux yeux de ceux qui rédigent les lois fiscales et les normes de comptabilité. Il devrait en être de même pour les utilisateurs des états financiers, et ce, pas seulement au moment de déterminer si un bénéfice ou un avantage a été conféré à un apparenté ou lorsqu’on cherche à confirmer si la juste valeur marchande de la transaction a été respectée.

Revenons à l’histoire d’Enron, où des millions de dollars ont été dissimulés dans près de 2 000 sociétés-écrans apparentées à Enron. Grâce à ces sociétés apparentées, Enron pouvait non seulement se vendre plusieurs fois des produits à elle-même, mais également comptabiliser des investissements dans ces sociétés qui n’exerçaient des activités que sur papier. À cette époque, il y avait beaucoup moins de réglementation ou de normes qui requéraient la divulgation de ces sommes importantes, contrairement à aujourd’hui. Si ces règles avaient existé, les utilisateurs des états financiers d’Enron auraient peut-être pu observer que la proportionnalité de ces investissements ne tenait pas debout et auraient pu poser plus de questions. Ils auraient alors réalisé qu’il n’y avait pas de valeur effective à ces transactions et que cet argent était en fait utilisé autrement.

La divulgation des transactions entre apparentés est principalement la responsabilité des administrateurs. En effet, souvent, eux seuls sont en mesure de connaître toutes les parties qui prennent véritablement part aux transactions. Malheureusement, les décisions de ne pas divulguer ces transactions sont des choix qui peuvent être effectués pour surévaluer les profits et les actifs ou, au contraire, sous-évaluer les dettes et les charges. Par ailleurs, qu’arrive-t-il quand une société conclut une transaction avec une partie apparentée à un ou plusieurs employés sans le savoir ?

Rappelons qu’il peut être normal pour une entreprise de conclure des transactions avec des apparentés. Ainsi, l’oubli de divulguer une transaction avec un apparenté pourrait n’être qu’une erreur ; il ne s’agit pas nécessairement d’une tentative de dissimuler la transaction. Néanmoins, l'importance d'évaluer et de relever les transactions entre apparentés est primordiale pour une saine gouvernance d'entreprise au sens large. Le recours à des transactions à répétition avec des apparentés, qui peuvent souvent laisser présager des techniques comptables et financières dites « agressives », peuvent, en outre, avoir une incidence sur le ton donné par les hauts dirigeants.

Un fait intéressant sur cet appétit pour le recours à répétition aux transactions avec des apparentés nous vient d’une étude du Committee of Sponsoring Organizations of the Treadway Commission (« COSO ») réalisée au lendemain d’Enron. Cette étude a analysé qu’aux États-Unis, les sociétés accusées de fraude par la Securities and Exchange Commission (« SEC ») rapportaient plus de transactions entre apparentés que celles qui n’ont jamais été accusées.

Qui devrait s’y intéresser?

Les utilisateurs des états financiers ont tous intérêt à ce que les transactions entre apparentés soient divulguées et évaluées correctement. Les cadres aussi. Cependant, ce n’est pas tout le monde qui maîtrise bien le sujet, ce qui est peut-être le cas de vos clients. Pensons à vos clients qui sont des actionnaires minoritaires ou des actionnaires passifs ou dont la participation dans les activités d’exploitation est moins grande. Comment peuvent-ils s’assurer que la direction fait preuve de transparence lorsqu’elle conclut ce type de transaction? Soupçonnent-ils des produits et services susceptibles de provenir des proches de la haute direction ou de parties apparentées aux employés?

La vigilance entourant les transactions entre apparentés est aussi de mise dans le cadre d’une acquisition d’entreprise. Vous pourriez avoir des clients qui ont récemment acquis une société où ils ne sont pas certains que ces transactions ont été adéquatement divulguées ou proprement évaluées.

Quoi surveiller?

Comme nous le précisions précédemment, sans être un indicateur certain de fraude dans les états financiers, la présence d’une quantité significative de transactions entre apparentés doit inciter les utilisateurs à poser des questions supplémentaires. Voici quelques exemples de transactions entre apparentés où il y a lieu de garder l’œil ouvert.

  1. Prêts à des sociétés apparentées: Il arrive qu’une société veuille s’« auto-financer » au moyen de prêts obtenus d’apparentés à des conditions avantageuses. Il y a ici un transfert de fonds entre deux sociétés. Mentionnons également l’importance de bien analyser les modifications de prêts et les extinctions de prêts entre apparentés susceptibles d’entraîner la comptabilisation d’un gain ou d’une perte. Il est aussi important d’analyser les taux d’intérêt.
  2. Ventes ou achats à des apparentés dont la relation n'a pas été révélée : Les ventes ou les achats à des apparentés sont souvent faits à des conditions plus favorables qu’une transaction similaire réalisée avec un tiers.
  3. Frais de services facturés à des apparentés : À l’instar du point précédent, l’ajout de frais de services ou de frais de gestion entre apparentés peut être une manière de gonfler artificiellement les produits et de transférer des fonds à la demande entre sociétés apparentées.
  4. Évaluation des investissements dans des sociétés apparentées : Il s’agit ici aussi d’une façon de transférer de la richesse d’une société à l’autre au besoin, ce qui risque d’entraîner la surévaluation des actifs et des participations.

En cas de doute ou de soupçons lors de la revue d’états financiers qui vous sont soumis, il est primordial de s’entourer d’une équipe qualifiée et expérimentée qui comprendra un juricomptable. Ne manquez pas la suite de cet article dans une future parution du Monde juridique.

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