Malgré l’incertitude qui a suivi la démission de la vice-première ministre et ministre des Finances, l’Énoncé économique de l’automne de 2024 du gouvernement fédéral a été déposé par la députée et leader du gouvernement à la Chambre des communes, l’honorable Karina Gould.
Compte tenu de l’instabilité politique qui ne cesse de croître, il est difficile de prédire la direction que prendront plusieurs des idées mises de l’avant dans l’Énoncé économique. MNP continue de surveiller étroitement la situation afin d’avoir une meilleure compréhension de l’incidence que les mesures pourraient avoir, notamment celles qui touchent la Loi de l’impôt sur le revenu ainsi que d’autres mesures susceptibles d’avoir un effet à long terme sur nos clients.
Aucune modification aux taux d’imposition des particuliers ou des sociétés n’a été annoncée. Cependant, le ministère des Finances (le ministère) a présenté plusieurs mesures fiscales visant les entreprises et les particuliers. Des bonifications ont aussi été proposées concernant les encouragements fiscaux pour la recherche scientifique et le développement expérimental (RS&DE). Le ministère a confirmé son intention d’aller de l’avant avec les mesures fiscales annoncées précédemment.
Voici les faits saillants de nature fiscale qui ressortent de l’Énoncé économique de cette année.
Mesures visant l’impôt sur le revenu des sociétés
Remise canadienne sur le carbone pour les petites entreprises
La Remise canadienne sur le carbone pour les petites entreprises est un crédit d’impôt remboursable automatique versé directement aux entreprises admissibles qui se trouvent dans les provinces où la redevance sur les combustibles s’applique. Les sociétés qui ont produit leurs déclarations de revenus pour 2023 au plus tard le 15 juillet 2024 devraient avoir déjà reçu leurs paiements.
L’Énoncé économique propose de modifier certains éléments de cette remise pour l’année de redevance sur les combustibles 2024-2025 et les années suivantes. L’Énoncé économique propose d’étendre le crédit d’impôt aux sociétés coopératives et aux caisses de crédit, à partir de l’année de redevance sur les combustibles 2024-2025. Un paiement minimum serait établi de sorte qu’une société admissible comptant jusqu’à 20 employés recevrait un paiement correspondant au fait d’avoir 20 employés. Les montants des paiements seraient réduits selon la méthode de l’allocation décroissante lorsque le nombre d’employés est de 300 à 500, et la remise serait éliminée dès que le nombre d’employés atteint 500.
Le crédit d’impôt demeure disponible pour une SPCC qui produit sa déclaration de revenus pour l’année civile dans laquelle l’année de la redevance sur les combustibles commence avant le 15 juillet de l’année civile suivante.
Observation de MNP : L’Énoncé économique mentionne que la remise est non imposable, ce qui semble confirmer l’annonce non officielle faite antérieurement par le ministère à propos du traitement fiscal des paiements. Sur la base des informations connues, il semble également que la remise demeure non disponible pour les sociétés de personnes, même celles dont tous les associés sont des sociétés.
Crédits d’impôt pour l’économie propre
L’Énoncé économique fournit de plus amples renseignements sur certains crédits d’impôt pour l’économie propre. Plus précisément :
- Crédit d’impôt à l’investissement dans l’électricité propre : Sont fournies dans l’Énoncé économique les conditions à remplir et les obligations de déclaration pour les sociétés d’État provinciales ou territoriales qui souhaitent demander le crédit d’impôt. De même, l’Énoncé économique propose d’inclure la Banque de l’infrastructure du Canada comme entité admissible au crédit d’impôt.
- Crédit d’impôt à l’investissement dans la chaîne d’approvisionnement de véhicules électriques : L’Énoncé économique décrit les modalités de la conception et de la mise en œuvre de ce crédit d’impôt. Pour y avoir droit, une entreprise admissible doit investir dans des biens généralement utilisés dans au moins l’un des trois segments admissibles de la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques (VE) : l’assemblage de VE, la production de batteries de VE et la production de matériaux actifs de cathodes. Le ministère entend publier un avant-projet pour consultation.
- Crédit d’impôt à l’investissement dans l’hydrogène propre : Le crédit d’impôt sera élargi pour inclure la production d’hydrogène par pyrolyse du méthane parmi les filières de production admissibles. L’Énoncé économique fournit des renseignements supplémentaires sur l’application du crédit aux projets de cette nature.
Déclaration par les organisations à but non lucratif (OBNL)
L’Énoncé économique propose d’apporter plusieurs changements aux exigences de déclaration pour les OBNL afin d’améliorer la transparence dans ce secteur. À l’heure actuelle, une OBNL est tenue de produire une déclaration de renseignements que si les conditions suivantes sont satisfaites :
- le total de ses revenus passifs dépasse 10 000 $;
- le total de ses actifs à la fin de l’exercice antérieur a dépassé 200 000 $;
- elle devait produire une déclaration de renseignements pour un exercice antérieur.
L’Énoncé économique propose d’élargir les exigences de déclaration en obligeant les OBNL dont les revenus bruts sont supérieurs à 50 000 $ à produire également une déclaration annuelle de renseignements des OBNL. Il propose aussi que celles qui n’atteignent pas les seuils décrits ci-dessus produisent une nouvelle déclaration abrégée. Selon cette nouvelle exigence de déclaration, les OBNL seraient tenues de fournir des renseignements de base qui, de manière générale, comprendraient diverses informations d’identification, une description des activités de l’organisation, y compris si elle en mène à l’étranger, de même que le total de ses actifs, passifs et revenus annuels.
Ces mesures s’appliqueraient aux années d’imposition 2026 et les suivantes.
Observation de MNP : Cette proposition cadre avec l’objectif global d’améliorer la divulgation d’information et d’accroître les sources d’information sur les contribuables à transmettre à l’Agence du revenu du Canada.
Passation en charges immédiate et accélérée
L’Énoncé économique propose de rétablir dans son intégralité l’incitatif à l’investissement accéléré et les mesures de passation en charges immédiate pour les biens admissibles acquis à partir du 1er janvier 2025 et prêts à être mis en service avant 2030. Les mesures de passation en charges accélérée rétablies sont celles qui s’appliquent aux machines et au matériel de fabrication ou de traitement et au matériel de production d’énergie propre ou de conservation d’énergie, ainsi qu’aux véhicules à émission zéro.
Les déductions pour amortissement bonifiées seront retirées progressivement à compter de 2030, et complètement éliminées pour les biens qui sont prêts à être mis en service après 2033.
Les biens admissibles acquis et prêts à être mis en service avant 2030 qui sont assujettis à la règle de la demi-année peuvent bénéficier d’une DPA bonifiée égale à trois fois la déduction habituelle pour la première année aux termes de l’incitatif à l’investissement accéléré et peuvent être admissibles à une déduction bonifiée de 100 % pour la première année en vertu des règles de passation en charges immédiate.
Recherche scientifique et développement expérimental (RS&DE)
Dans l’Énoncé économique, le gouvernement propose d’apporter plusieurs améliorations au programme d’encouragements fiscaux pour la RS&DE. Dans le cadre du programme d’encouragements fiscaux pour la RS&DE, les dépenses admissibles sont entièrement déductibles et généralement admissibles à un crédit d’impôt à l’investissement (CII). Le taux de remboursement du crédit varie selon les caractéristiques du contribuable, notamment son statut légal et sa taille. Règle générale, un contribuable a droit à un CII de base non remboursable de 15 % sur les dépenses admissibles pour la RS&DE. Certaines sociétés ont droit à un CII bonifié remboursable à un taux de 35 % sur les dépenses admissibles pour la RS&DE jusqu’à concurrence du plafond de dépenses en vigueur.
L’Énoncé économique propose d’élargir les critères d’admissibilité et introduit plusieurs changements notables :
- Rehausser la limite de dépense annuelle aux fins du CII au taux majoré de 35 % pour la faire passer de 3 millions de dollars à 4,5 millions de dollars;
- Augmenter la fourchette de réduction progressive du capital imposable de l’année précédente pour faire respectivement passer la limite inférieure de 10 millions de dollars à 15 millions de dollars et la limite supérieure de 50 millions de dollars à 75 millions de dollars;
- Étendre aux sociétés publiques canadiennes admissibles le CII au taux majoré de 35 % pour les dépenses admissibles pour la RS&DE jusqu’à concurrence d’une limite de dépense annuelle de 4,5 millions de dollars. À l’origine, le CII bonifié n’était disponible que pour les sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC).
- Pour les sociétés publiques canadiennes admissibles, le plafond des dépenses de 4,5 millions de dollars sera réduit selon la méthode de l’allocation décroissante lorsque les revenus bruts moyens de la société sur les trois exercices précédents se situent entre 15 millions de dollars et 75 millions de dollars. Les membres d’un groupe de sociétés seront tenus de partager l’accès au plafond des dépenses de 4,5 millions de dollars.
- Les SPCC auraient l’option de réduire progressivement le plafond des dépenses de 4,5 millions de dollars lorsque le capital imposable utilisé au Canada pour l’année d’imposition précédente se trouve entre 15 millions et 75 millions de dollars ou qu’elles utilisent la même structure d’élimination progressive du revenu brut que celle proposée pour les sociétés publiques canadiennes.
- Proposition de rendre de nouveau admissibles les dépenses en capital (qui n’étaient plus admissibles depuis 2014) à titre de déduction du revenu et aux fins du CII du programme RS&DE. Ce changement proposé s’appliquerait aux biens acquis à compter du 16 décembre 2024.
Les changements proposés entreraient en vigueur pour les années d’imposition qui commencent le 16 décembre 2024 ou par la suite. Le gouvernement fédéral fournira plus de détails sur les mises à jour du programme RS&DE dans son budget de 2025.
Pour encourager le développement et la conservation de la propriété intellectuelle au Canada, le gouvernement annonce également dans l’Énoncé économique son intention de créer un régime privilégié des brevets, lequel propose généralement un taux d’imposition préférentiel sur le revenu tiré de certains types de propriété intellectuelle. Le gouvernement étudie les commentaires issus des consultations tenues plus tôt cette année et présentera dans le budget de 2025 les modalités de ce régime.
Observation de MNP : Le plafond des dépenses et les seuils de capital imposable n’ont pas été ajustés depuis des décennies. Pour la première fois, les sociétés ouvertes à petite capitalisation bénéficieront maintenant d’un crédit d’impôt bonifié remboursable à un taux de 35 % pour la RS&DE. Les modifications proposées au programme de RS&DE se traduisent par un soutien plus généreux pour les PME, ainsi que pour les sociétés ouvertes canadiennes à petite capitalisation. Dans l’ensemble, ces changements au programme de RS&DE et à l’écosystème de l’innovation au Canada sont les bienvenus.
Mesures visant l’impôt sur le revenu des particuliers
Exclure la Prestation canadienne pour les personnes handicapées du calcul de l’impôt
L’Énoncé économique propose d’exempter les montants reçus aux termes de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées du revenu en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu. Cette exemption aidera à faire en sorte que les prestations et les programmes fondés sur le revenu, comme l’Allocation canadienne pour enfants, ne soient pas réduits en raison des versements au titre de la Prestation canadienne pour les personnes handicapées.
Cette mesure s’appliquerait aux années d’imposition 2025 et suivantes.
Supplément rural de la Remise canadienne sur le carbone
L’Énoncé économique propose d’étendre l’admissibilité au supplément rural de 20 % aux personnes qui, au sein d’une région métropolitaine de recensement (RMR), résident dans une région rurale (comptant moins de 1 000 personnes) ou dans un petit centre de population (comptant au plus 30 000 personnes) tels que désignés par Statistique Canada.
Cette mesure propose également de fonder l’admissibilité au supplément sur ces désignations géographiques conformément au plus récent recensement publié avant l’année d’imposition. Une liste partielle des régions qui seraient nouvellement admissibles au supplément rural figure au Tableau 2 de l’Énoncé économique.
Les changements proposés s’appliqueraient à l’année d’imposition 2024, ce qui signifie que les premiers versements en vertu des règles proposées auraient lieu en avril 2025.
Déductions pour les habitants de régions éloignées
L’Énoncé économique propose de reclassifier l’archipel de Haida Gwaii de la zone intermédiaire à la zone nordique, ce qui permettrait à ses résidents de demander jusqu’à concurrence de la valeur maximale des déductions pour les habitants de régions éloignées (ils n’ont actuellement droit qu’à la moitié du montant des déductions).
Ce changement s’appliquerait aux années d’imposition 2025 et les suivantes.
Report par roulement des gains en capital relatif à des placements
Les particuliers ont actuellement le droit de reporter l’impôt sur les gains en capital réalisés au moment de la disposition admissible d’actions déterminées de petite entreprise dans la mesure où le produit de la disposition sert à acquérir des actions déterminées de petite entreprise de remplacement. Un certain nombre de conditions doivent être remplies pour obtenir l’admissibilité en vertu de ces règles.
L’Énoncé économique propose d’augmenter la période pour l’acquisition d’actions de remplacement et d’élargir ce que l’on qualifie d’action déterminée de petite entreprise. Premièrement, la période pour acquérir les actions de remplacement serait élargie de manière à englober l’année de la disposition et toute l’année civile qui suit l’année de la disposition. Deuxièmement, une action déterminée de petite entreprise comprendrait aussi bien les actions ordinaires que les actions privilégiées. Enfin, la limite de la valeur comptable des actifs de la société exploitant une petite entreprise et des sociétés liées passerait de 50 millions à 100 millions de dollars. Ces changements seraient en vigueur pour les dispositions admissibles qui surviennent à compter du 1er janvier 2025.
Administration du régime fiscal
Financement de l’Agence du revenu du Canada (ARC)
L’Énoncé économique propose d’accorder à l’ARC un financement de 451,5 millions de dollars sur cinq ans, notamment pour renforcer la capacité de l’ARC de prévenir la fraude et de mener des audits, ce qui permettra de récupérer 2,9 milliards de dollars en revenus fiscaux. Plusieurs priorités sont mentionnées, y compris achever les audits des subventions d’urgence accordées aux entreprises et combler les principales lacunes en matière d’observation des règles fiscales parmi les populations fortunées, les personnes actives dans l’économie clandestine et les fiducies déclarantes.
Observation de MNP : À la lumière de l’augmentation du financement de l’ARC et du resserrement de diverses exigences de déclaration, les clients devraient se préparer à une correspondance accrue avec l’ARC et à une plus grande probabilité d’audit.
Mesures annoncées antérieurement
L’Énoncé économique confirme l’intention du ministère d’aller de l’avant avec certaines mesures fiscales annoncées antérieurement. Le ministère a indiqué que ces mesures tiendront compte des consultations et des délibérations qui ont eu lieu depuis leur publication.
Les propositions législatives concernent les mesures suivantes :
- Gains en capital et exonération cumulative des gains en capital;
- Incitatif aux entrepreneurs canadiens;
- Impôt minimum de remplacement;
- Exigences de déclaration plus strictes pour les fiducies;
- Non-conformité aux demandes de renseignements;
- Restrictions relatives à la déductibilité des intérêts;
- Divers crédits d’impôt pour l’économie propre;
- SPCC en substance;
- Règles relatives au choix visant une coentreprise en matière de TPS/TVH;
- Loi sur l’impôt minimum mondial.
MNP a pris part à des consultations sur bon nombre de ces mesures pour faire valoir les points à prendre en considération et formuler des recommandations sur la mise en œuvre des propositions. Cliquez sur le lien pour voir les plus récents mémoires que nous avons présentés. Veuillez noter que ces mémoires ont été présentés au gouvernement fédéral en anglais et qu’ils ne sont disponibles que dans leur version originale :